[Sénégal] Des greniers de prévoyance soudure pour réduire l’insécurité alimentaire

Pour lutter contre l’insécurité alimentaire, l’UGPM a mis en place une stratégie qui consiste à prévoir des stocks de sécurité de denrées alimentaires dans les villages. Cet instrument de stockage et de conservation des céréales appelé « grenier de prévoyance soudure » aide à contrer les périodes de soudure*. Son objectif principal est de contribuer à la sécurité alimentaire des humains et des animaux.

Depuis 1985, l’UGPM aide les familles à développer leurs exploitations agricoles à travers des pratiques agroécologiques et en diversifiant leurs sources de revenus. Attaché aux valeurs de l’agriculture paysanne, l’UGPM essaye de promouvoir le retour au local, la protection de l’environnement et la solidarité en luttant pour que le paysan puisse acquérir une véritable viabilité économique et sociale.
© Frères des Hommes - L’équipe de l’UGPM

Le contexte et les objectifs des greniers de prévoyance soudure

Le contexte de la soudure des années 2000 à 2010

Suite à une étude paysanne sur la soudure* en 2003 (*= période de l’année où les récoltes précédentes sont épuisées et celles de l’année en cours ne sont pas encore disponibles coïncidant généralement avec la saison des pluies), après plusieurs rencontres des paysans de l’UGPM pour raconter la soudure entre 2000 et 2002, le constat a été que les exploitations familiales n’arrivaient pas à couvrir leurs besoins alimentaires.

Cela résultait essentiellement de trois facteurs :

  1. La baisse des rendements agricoles liée à la faiblesse de la pluviométrie, de la mauvaise qualité des semences et la baisse de la fertilité des sols ;
  2. Les mauvaises politiques mises en œuvre par les dirigeants et qui ne prennent pas en compte les préoccupations des paysans et des communautés rurales ;
  3. La mauvaise gestion des récoltes avec le gaspillage lors des cérémonies religieuses, familiales, également dues aux changements d’habitudes alimentaires.

C’est ainsi que l’UGPM a pensé les greniers de prévoyance soudure, dont les stocks sont constitués de trois manières :

  1. Les épargnes volontaires en nature (chaque famille en fonction de sa production peut faire une épargne qui ne sera retirée que pendant la période hivernale) permettant aux familles de se consacrer aux travaux champêtres ;
  2. L’achat de céréales par le groupement à partir de fonds propres ou un crédit ;
  3. Les produits des champs collectifs.

Le groupement utilise ses fonds propres pour renforcer le stock et les bénéfices issus de la vente de semences de qualité, et différentes opérations de ventes sont aussi réalisées pour renforcer le stock.

De manière plus spécifique, il s’agit de :

  • sécuriser et gérer rationnellement les récoltes (conserver les semences, éviter le gaspillage des récoltes)
  • prévenir la période de soudure (dégager du temps nécessaire pour les travaux champêtres pendant la période de soudure)
  • éviter la décapitalisation et les crédits usuriers des biens de la famille pendant la période de soudure
  • renforcer la solidarité entre les habitants du village

Le rôle de l’UGPM dans la mise en place et le fonctionnement des greniers

© Frères des Hommes - Une partie de l’équipe de l’UGPM

Pour atteindre tous ces objectifs, l’UGPM se met à disposition et accompagne les groupements qui souhaitent mettre en place cette initiative. Les séances d’animation organisées par l’UGPM ont permis aux membres des groupements de prendre conscience de l’importance des greniers de prévoyance soudure et de participer à cette activité d’auto-défense. Les membres des comités de gestion sont formés sur la tenue des outils. En effet, des ateliers de production d’outils et sur la gestion technique du stock ont été organisés par l’UGPM. Les animateurs de zones assurent le suivi permanent de l’évolution des stocks. Ils animent des réflexions au sein des groupements pour la mobilisation des acteurs et la définition de nouvelles stratégies de lutte contre l’insécurité alimentaire et le développement local. Des visites d’échange d’expériences entre groupements pour s’améliorer mutuellement ont également lieu. Grâce à l’UGPM, les groupements ont pu réfectionner ou construire des magasins de stockage. Cela passe par le financement à hauteur de 50% de la construction ou de la réfection du magasin. Enfin, un fonds de crédit pour l’achat des céréales a été mis en place pour renforcer les stocks des greniers.

Les avantages et bénéfices pour les villages

Depuis l’existence du grenier, la soudure et l’endettement sont un vieux souvenir dans les villages :

  • La céréale (qui est généralement du mil) est toujours disponible dans le village.
  • A chaque fois qu’un membre est dans le besoin, il peut faire recours aux responsables pour avoir un crédit en nature (remboursable après les récoltes).
  • Les chefs d’exploitation familiale n’ont plus à recourir aux crédits auprès des usuriers.
  • Le groupement capitalise un fonds qui lui permet d’avoir du mil en permanence dans le village.
  • Le magasin villageois sert de lieu de stockage pour le grenier, et pour la sécurisation des récoltes familiales.
  • Réduction du bradage et du gaspillage.


© Frères des Hommes - Exemple d’un grenier de prévoyance soudure

De nouvelles formes de solidarité naissent :

  • Les familles qui ont produit plus que leur besoin familial, font des crédits en nature à celles qui sont déficitaires, pour être payées après les récoltes.
  • La solidarité se développe dans le village entre les membres et les non-membres des groupements. En effet, au moment de la soudure, le grenier donne également des crédits aux non-membres. Ils peuvent utiliser le grenier pour conserver leurs récoltes. Le commerçant ne parvient plus à vendre ou acheter dans le village à des prix usuriers.
  • Le groupement met toujours un prix plus intéressant que ça soit à la vente ou à l’achat. Le groupement dispose d’un fonds qui lui permet de faire un placement pour éviter la vente prématurée des récoltes aux usuriers.
  • Grâce aux greniers les propriétaires/ utilisateurs d’équidés parviennent à maintenir l’état nutritionnel des animaux de trait. Comme pour l’humain, le mil renforce la force physique des équidés.

Ces greniers, bien que nécessaires et grandement utiles pour les groupements, présentent aussi des points faibles, soulignés lors d’un atelier réunissant des membres de trois greniers, où chacun des membres ont proposé des pistes d’amélioration pour chacune de ces difficultés pour les années à venir.

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