Dans la continuité de leur solide relation partenariale, Frères des Hommes et Fedina se sont engagés en 2018 dans un projet de 3 ans dont l’objectif était de promouvoir les droits sociaux, économiques et culturels des femmes travailleuses et retraitées du secteur informel pour renforcer leur pouvoir d’agir et permettre leur émancipation.
Les oubliées de la société indienne
En 2014, l’Inde figurait à la 130ème place mondiale selon l’indice d’égalité de genre du PNUD, sur 188 pays classés. La situation des femmes dans le pays est en effet des plus préoccupantes, comme en témoigne Usha Ravikumar, chargée de la mobilisation des ressources à Fedina : « On est vues comme des citoyennes de seconde classe car on est dans un système très patriarcal. Même dans les classes supérieures, les hommes ont la priorité. […] Les discriminations économiques ont lieu partout, que ce soit dans le secteur du travail formel ou informel. »
Sur cette même question des discriminations dont sont victimes les femmes indiennes, Sridevi Sajjan, responsable du projet avec Frères des Hommes, renchérit : « Cela s’observe dans tous les champs de la société que ce soit dans le domaine du travail, de la manière de s’habiller, de l’expression orale, de la prise de décisions etc. Il n’y a aucune égalité entre les hommes et les femmes. » Et les témoignages sont longs, et durs à entendre. Peu importe leur caste, leur richesse, leur nom, ou leur métier, les femmes indiennes sont déconsidérées au sein de leur société.
Depuis des dizaines d’années, notre partenaire Fedina met tout en œuvre pour réduire ces inégalités et accompagner les femmes vulnérables. Pour ce faire, l’organisation développe des actions de conscientisation générale des droits des femmes, et des actions collectives de mobilisation sociale. Poornima, responsable du pôle formation de Fedina, revient sur cette ambition : « J’ai compris qu’il fallait tout faire pour obtenir des changements ! » et Sridevi d’ajouter « Il y en a assez, nous les femmes nous ne sommes pas des victimes, nous ne devons pas être contrôlées par d’autres personnes, nous sommes des êtres humains à part entière, d’où l’importance d’être libres et de gagner son propre argent. »
Des formations pour les femmes discriminées
Nous avons concentré notre projet sur les femmes retraitées, les épouses dalits, les travailleuses domestiques, ainsi que les employées du textile. Être femme et travailler en Inde, c’est être confrontée à de nombreuses injustices, une précarité économique souvent couplée à des violences physiques et psychologiques, au sein du foyer comme sur son lieu de travail. Usha Ravikumar explique :
Ces personnes n’ont aucune protection, elles effectuent un grand nombre d’heures de travail, parfois 12 à 13h par jour. On a travaillé sur la conscientisation des travailleuses, à les informer sur leurs droits, les aider à pouvoir et savoir les revendiquer […] L’idée est de demander une protection de la part de l’Etat qui s’est distancié au fur et à mesure des travailleurs, il a décliné toute responsabilité, même des éléments de base tels que la sécurité sociale qui n’est plus assurée.
Pour ce faire, presque 240 femmes ont reçu une formation en droit du travail, plus de 360 ont participé à celle sur la protection des femmes, et presque 150 ont assisté à la formation en leadership et empowerment. Des formations ont également été organisées pour sensibiliser et prévenir les violences domestiques.
Fedina puise son savoir-faire dans la proximité entretenue avec les femmes que l’organisation accompagne : sur les trois années du projet, 10 665 visites à domicile ont été réalisées par les animatrices et animateurs du projet. Des réunions mensuelles ont également été systématisées, réunissant au total 5 088 femmes lors de 524 réunions. Sridevi témoigne des conséquences positives de ce suivi et des formations : « Il y a vraiment eu une prise de conscience incroyable qui s’est déroulée grâce aux formations, que ce soit sur les salaires et sur les modes de vie décents. »
La formation comme outil d’émancipation ?
Pour Frères des Hommes, il s’est agit tout d’abord d’apporter un soutien financier et pédagogique pédagogique à son partenaire. La gestion du projet au sein de l’association s’est faite en tandem entre nos chargées de mission et nos chargées de formation. En effet, le pôle Form’action s’est mobilisé pour renforcer dans un premier temps les équipes de formation de Fedina. Cet appui-conseil a permis de formaliser les outils pédagogiques utilisés lors des séances avec les femmes. L’objectif était de recenser toutes les activités proposées par Fedina et de construire par la suite un plan de formation contribuant au renforcement du pouvoir d’agir des femmes et organisations de travailleuses.
En plus de résultats encourageants sur l’émancipation individuelle des femmes indiennes, des actions de mobilisations collectives ont marqué ces trois années, pleines de revendications et d’ambitions pour une société indienne plus inclusive et juste !