La situation chez nos partenaires (au 6 avril)

Nos partenaires poursuivent, comme Frères des Hommes, leurs actions du mieux possible face à la crise sanitaire. Ils s’adaptent à des contextes sociaux et économiques qui deviennent de plus en plus compliqués. Quelle est leur situation et celle des populations qu’ils accompagnent, dans le Haut Plateau Central en Haïti, à Bangalore en Inde, à Butaré dans le sud du Rwanda, dans la région du Kayor au Sénégal, à Bukavu en RDC et dans la banlieue de Lima au Pérou ?

Haïti :

Depuis le 21 mars, l’Etat haïtien a annoncé la fermeture des écoles, des aéroports et ports, un couvre-feu de 20h à 5h du matin et l’interdiction de toute réunion de plus de 10 personnes. Les doutes sont nombreux dans la population sur la capacité de l’Etat haïtien à faire respecter ces décisions. 16 cas de contamination ont été confirmés en Haïti, aucun décès. Mais la progression de l’épidémie dans la République dominicaine inquiète, notamment la population du Haut Plateau Central, frontalier de ce pays.
Les salariés du Mouvement paysan Papaye (MPP) qui habitent près du siège à Papaye continuent de venir travailler, en prenant des mesures de précaution. Les autres ont limité leurs déplacements. Il a été décidé par le MPP de suspendre toutes les réunions dépassant 10 personnes, les activités qui ne demandent pas ce type de rencontre sont maintenues. La Radio Voix Paysans, que gère le MPP, va être utilisée pour sensibiliser la population des environs de Papaye et Hinche aux gestes barrières.

Inde :

Le gouvernement indien a décidé un confinement national de 21 jours, incluant l’Etat du Karnataka, où intervient FEDINA, notre partenaire. Cet Etat fait partie de ceux les plus touchés par le covid19 avec 110 cas et trois décès. Comme dans beaucoup d’autres pays, les travailleurs du secteur informel sont les plus touchés par le confinement, notamment les employées de maison, les femmes retraitées, les ouvrières du textile, des populations qu’accompagne Fedina. Le gouvernement a annoncé une aide de 21 milliards d’euros pour les foyers les plus pauvres et la mise en place d’une distribution de repas gratuits. Mais la question de l’accessibilité et la mise en place de ces mesures est grande.
Les bureaux de FEDINA ont fermé et l’équipe travaille à distance, en essayant de maintenir le plus possible le contact avec les responsables des collectifs d’employées de maison ou de retraitées qu’elle accompagne habituellement. Les réunions, les rassemblements ou les formations en droit du travail ou droit des femmes sont suspendues jusqu’à nouvel ordre.

Sénégal :

C’est un presque confinement qui a été décidé le 26 mars au Sénégal avec la mise en place pour 12 jours d’un couvre-feu, la limitation des déplacements, la fermeture des frontières aériennes, l’interdiction des manifestations publiques et la suspension des cours dans les écoles et universités. 190 cas ont été détectés et un décès a été comptabilisé. En milieu rural, on constate un retour de ceux partis à Dakar pour travailler mais qui reviennent car ils n’ont plus les moyens de gagner leur vie. Si la situation dure, il sera difficile de maintenir les « vivres de soudure », utilisés pendant la période entre deux récoltes.
Les bureaux de l’UGPM sont fermés. Le président et secrétaire général assurent le lien entre tous, notamment pour ceux qui ne bénéficient pas d’internet chez eux, un système d’information interne sera bientôt mis en place. Les activités dans les villages sont suspendues et l’équipe continue à travailler à distance.

RDC :

Pour l’instant, le confinement n’est pas imposé mais l’Etat invite fortement la population à rester chez elles. Au niveau national, 123 cas ont été identifiés, pour 11 décès. A Bukavu, où se trouve le siège de l’APEF, notre partenaire, 2 cas ont été nouvellement identifié et on constate une prise de conscience du virus de plus en plus importante de la population. Il y a toutefois une réelle inquiétude par rapport au manque d’infrastructures médicales et au manque de mesures prises par l’Etat pour apporter une aide alimentaire aux plus vulnérables. Le risque est encore plus fort au Sud Kivu, où la majorité des denrées alimentaires vient de l’extérieur. Les frontières ont été fermées, entrainant une hausse des prix. Une part importante de la population, travaillant dans le secteur informel, ne peut se permettre de rester chez elle.
Les bureaux de l’APEF ne sont pas encore fermés, mais la majorité de l’équipe travaille à distance. Avec les 2 nouveaux cas identifiés à Bukavu, l’APEF s’attend toutefois à devoir fermer. Toutes les activités nécessitant le regroupement de plus de 20 personnes sont arrêtées.

Rwanda :

Le Rwanda a été le premier pays africain à décréter le confinement total de sa population jusqu’au 19 avril. Les déplacements et les visites non essentiels à l’extérieur du domicile ne sont pas autorisés, les frontières sont fermées ainsi que les magasins et les marchés sont fermés, à l’exception de ceux qui vendent des produits de première nécessité. Il y a une forte probabilité que le confinement soit prolongé. Le mouvement des villes vers les campagnes est impossible, il faut avoir une raison importante pour pouvoir se déplacer (courses, raisons médicales…). Les paysans peuvent se rendre sur leur parcelle de terre mais seul. Les marchés locaux vont bientôt fermer sur les collines. Au niveau national, 75 cas sont officiellement déclarés, aucun décès, et sont situés en majorité à Kigali.

Les bureaux de DUHAMIC-ADRI et ADENYA sont fermés et les activités du projet Récasé sont mises en suspens. Tous les salariés de DUHAMIC sont en télétravail, y compris pour les salariés de l’équipe du projet Récasé. Un congé de 2 semaines a été donné à toute l’équipe d’ADENYA jusqu’au 31 mars. L’intégralité de l’équipe de Récasé travaille depuis chez elle depuis lundi. Seuls les animateurs de proximité ne travaillent pas pour le moment car impossible de mener les activités auprès des paysans. Toutes les activités « terrain » sont donc pour l’instant en pause. Toutefois plusieurs chantiers avancent à distance.

Pérou :

La population du pays est confinée depuis 3 semaines et l’état d’urgence déclaré, s’ajoute aussi un couvre-feu entre 20h et 6h du matin. Récemment, de nouvelles mesures sont entrées en vigueur. Les hommes peuvent sortir les lundis, mercredi, vendredi. Les femmes, mardi, jeudi, samedi. Le dimanche, personne ne sort. Lima concentre la plupart des cas de covid du pays avec 990 cas (sur 1323), notamment dans la zone de San Juan de Lurigancho, dans laquelle intervient Cenca. Il existe une vive inquiétude dans le pays quant à la capacité du système de santé de tenir le choc si la situation sanitaire venait à s’aggraver. Inquiétude également pour l’économie du pays, dans lequel 75% de la population travaille dans le secteur informel et donc forcée de sortir pour gagner sa vie. L’Etat péruvien a pris un certain nombre de mesures, dont l’octroi d’une aide de 100€ pour les ménages les plus pauvres, mais cette aide a du mal à parvenir aux familles. C’est le cas à San Juan de Lurigancho, notamment dans les parties hautes du quartier.
CENCA a fermé ses bureaux, toute l’équipe est en télétravail et en contact deux fois par semaine avec Abilia Ramos Alcantara, une des salarié.e.s de CENCA, qui habite San Juan de Lurigancho. Les activités de terrain ont toutes été mises en pause. CENCA a lancé une campagne en ligne de don en soutien aux familles les plus vulnérables, qui n’ont pas pu recevoir l’aide de l’Etat. 105 d’entre elles en ont bénéficié jusque-là sous la forme de paniers-repas. Une seconde distribution a pu avoir lieu pour une centaine de famille. Notre partenaire va aussi bénéficier d’un don d’une banque alimentaire pour 190 familles.