Au Pérou : valoriser l’action des femmes est une priorité

Le projet Habla Mujer (Paroles de femmes) soutenu par Frères des Hommes au Pérou bat son plein. Formations, partage de savoir-faire entre femmes mais aussi sensibilisation des hommes.

Attirer de nouveaux clients, développer son commerce

Le projet a mis en place la formation « Comment développer mon petit commerce ? » Dans un contexte social où domine l’idée que l’homme ramène le salaire à la maison, valoriser les commerces de ces femmes (le « petit » commerce est très présent au Pérou) est une priorité. Marie Bouret, notre volontaire sur place, et Jesus Quispe, membre de Cenca, ont animé la deuxième session de la formation avec pour "exercice" du jour : « combien je gagne avec mon commerce ? ». Marie explique « quand on discute avec les femmes elles savent exactement combien elles dépensent en nourriture, en transport, pour les enfants… mais dès qu’il faut remplir un tableau Dépenses-Revenus, cela se complique ». Le but de la séance était donc de montrer l’intérêt de systématiser l’information et de séparer le budget familial de celui du commerce. La session suivante a été consacrée au calcul des recettes et des dépenses, toujours dans l’objectif d’arriver à valoriser le bénéfice que les femmes font avec leur petit commerce. Pour animer ces formations, Jesus et Marie sont dans une approche de « faire avec » et en profitant d’être un petit groupe rentrent dans des méthodes plus actives. Pour continuer dans cette dynamique, les deux sessions suivantes ont traité du thème du « marché ». Une mini-étude de marché sur les habitudes des clients du quartier de Mariategui (le quartier de la banlieue de Lima où intervient le projet), mais également sur la concurrence, a permis de lancer des idées au sein du groupe : sur de nouveaux produits ou services, mais également pour la promotion de leur activité afin de fidéliser les clients.

L’objectif est que ces femmes développent leur activité, qu’elles soient en mesure de la gérer et de s’assurer un revenu constant. C’est aussi le sens du collectif d’artisanes « Talentos Artesanales » que soutient le projet. Depuis 4 sessions de formation sur le thème « Développer mon atelier de tourisme solidaire » ont eu lieu. Ces rencontres sont l’occasion de faire des exercices concrets : penser son atelier de tourisme solidaire, créer une affiche promotionnelle et calculer le coût du service. L’objectif est qu’à l’issue de ces temps d’échange et de mise en situation, les différentes associations ou coopératives qui forment le collectif mettent en place leur propre atelier créatif. Certaines artisanes ont eu l’occasion de passer à l’action : Inti Llakta et Tarpuy, deux organisations membres du collectif, ont investi le quartier touristique de Miraflores à Lima pour présenter leur savoir-faire aux habitants.

La coordinatrice de Tarpuy (debout sur la photo)

Du côté de la formation en pâtisserie, une quinzaine de femmes a assisté à une semaine de cours théorique avant de passer, la semaine suivante, à la pratique. La formation a lieu chaque mardi, jeudi et vendredi pour une durée totale de 4 mois. Ensuite, les femmes qui auront validé le cursus se verront remettre un diplôme délivré par le Ministère de l’Éducation au nom de l’Etat Péruvien.

La figure paternelle

L’accompagnement des femmes par Cenca a lieu aussi sur le plan social. Comme toutes les deux semaines, les femmes de Mariategui se sont réunies, entre elles, dans un espace qui leur est réservé. Au centre de la conversation menée par Fabiola Espinoza, membre de l’équipe de Cenca et co-animatrice de ces rencontres, le thème de la « figure paternelle. » Certaines n’ont pas connu leur père, d’autres si. Quel serait le père idéal à leurs yeux ? Quel serait le père qu’elles aimeraient que leurs fils deviennent ? « Mon père me maltraitait, ma mère essayait de m’aider mais il la maltraitait aussi » ; « J’aurais aimé qu’il soit plus compréhensif et me soutienne pour poursuivre mes études » ; « Un père doit savoir rire aussi, donner du temps à ses enfants ». L’occasion pour elles de se livrer sur des sujets parfois sensibles comme le souligne Fabiola : « A chaque réunion la confiance est plus grande, les femmes racontent des choses toujours plus intimes et personnelles, parfois avec la voix brisée. » La réunion a permis de faire ressortir des idées pour l’activité organisée dans le quartier à l’occasion de la Fête des pères. Ce jour-là, pour la première fois depuis le démarrage du projet, les femmes ont invité leur conjoint, leurs fils ou leurs frères, à se joindre à elles. Une première activité a permis aux pères de se mettre dans la peau des mères et inversement, avant d’aborder le thème de la "nouvelle masculinité". Pour Cenca, la thématique du genre ne se travaille pas seulement avec les femmes, mais aussi avec les hommes.

Lors de la fête des pères dans le quartier de Mariategui

Un accompagnement juridique pour les femmes victimes de violences

Chaque mardi depuis 3 mois déjà, Esther Alvarez, avocate et membre de l’équipe de Cenca, assure une permanence gratuite à Mariategui pour conseiller les personnes qui sollicitent son expertise. Quatre personnes sont ainsi venues lors du dernier atelier. Les femmes qui viennent à elle sont, pour la moitié, des femmes qui souffrent de violences familiales (pensions alimentaires non payées, abandon…) et l’autre moitié viennent parler de désaccord entre voisins ou de revendication de terres, une autre thématique traitée par notre partenaire CENCA à Mariategui.