« Les femmes devraient être prêtes à défendre leurs droits »

Comment sensibiliser les populations indiennes à la reconnaissance des droits des femmes et aux violences de genre ? Notre partenaire Fedina accompagne des employées de maison de la ville de Bangalore dans la défense de leurs droits ; l’une d’elle, Lakshmi, témoigne de son expérience personnelle et professionnelle.

Où travaillez-vous ?
Je travaille dans 3 maisons. J’y fais la vaisselle, je nettoie la maison et les vêtements. Je travaille près de l’hôtel Krishna, dans le centre de Bangalore.

Depuis combien de temps connaissez-vous Fedina ?
Je les connais depuis deux ans. Au début je n’avais pas de raison particulière de les rejoindre. Ils m’ont sollicitée pour devenir membre d’un groupe d’action et proposée de venir à une de leurs réunions. Après être allée à cette réunion, j’ai commencé à vraiment apprécier ce qu’ils proposaient, car ils prennent la défense des employées de maison. Depuis je ne rate aucune réunion, chaque mois.

En quoi Fedina agit pour et avec les populations qu’elle accompagne ?
C’est Fedina qui nous a par exemple accompagnées à demander des congés hebdomadaires et un salaire mensuel décent. Nous n’avions jamais eu de congés hebdomadaires. Les conseils de Fedina nous aident. Beaucoup de travailleuses comme moi en tirent bénéfice. Beaucoup d’entre nous ne sont pas conscientes de nos droits.

Comment se comportent vos employeurs avec vous ?
Je travaille dans une des trois maisons depuis 12 ou 14 ans. Ils sont comme une famille donc pour moi c’est étrange de parler de mes droits en tant que travailleuse. Je n’ai pas de congés hebdomadaires mais si je veux partir en vacances, ils me laissent partir. Quand j’ai des choses personnelles à faire, ils me laissent aussi du temps pour moi. Donc j’ai du mal à réclamer mes droits.

Comment Fedina dialogue t-il avec vous ?
Fedina nous conseille. On se sert de ces conseils pour agir. C’est comme ça qu’on interagit avec Fedina. Ils mettent certaines choses en lumière, ils m’ont par exemple demandé pourquoi je ne prenais pas de jour de congés, juste parce que mes employeurs me traitent comme si je faisais partie de la famille. Ils ne me payent que 5 000 roupies (58€), sans me donner de bonus. C’est comme ça qu’on interagit avec Fedina. Tant de travailleurs n’ont aucune idée de leurs droits, c’est pour ça que le travail de Fedina est important.

Est ce que vous pouvez parler des formations que vous avez suivies ?
J’en ai suivi de nombreuses. Tout récemment, j’en suivais une sur l’égalité de genre. Personnellement, il est vrai que je n’ai pas de problème à la maison, mais pendant cette formation, il y avait cette femme de 23 ans, avec déjà 3 enfants. Son mari l’a quittée et s’est trouvé une autre femme. Il gagne bien sa vie et vit confortablement dans une maison qu’il loue. Elle de son côté vit avec ses trois enfants dans une toute petite maison. Il ne participe financièrement en rien à la vie de la famille. Tous les jours cette femme se bat pour quelques centaines de roupies. Comme moi, elle travaille comme employée de maison.

Pourquoi est-ce important que femmes et hommes soient égaux ?
On ne peut faire de discrimination entre femmes et hommes parce que tous travaillent. Avant les femmes n’allaient pas travailler, elles ne faisaient que rester à la maison. Maintenant, un seul salaire n’est plus assez, les deux doivent aller travailler. Les deux doivent donc s’occuper de la maison, il ne devrait pas y avoir de discrimination à ce niveau. Dans les faits, les femmes travaillent au sein de leur foyer pour aller ensuite gagner leur vie à l’extérieur. Les femmes s’occupent des tâches ménagères, des enfants, de leur éducation, de leur santé. Les hommes ne prennent aucune responsabilité, ils vont au travail puis reviennent à la maison, c’est tout. Les femmes font en fait plus et cela devrait être reconnu.

Quelle serait la solution pour vous ? Comment pourriez-vous vous libérer de ces rapports de domination ?
Si on devait trouver une solution à cette situation, les femmes devraient être prêtes à défendre leurs droits. Elles devraient encourager une prise de conscience. Beaucoup d’entre elles ont encore peur de leurs maris et des conséquences si elles venaient à nous rejoindre dans cette action de conscientisation.