Regards croisés sur le volontariat

Sarah Hopsort est volontaire Frères des Hommes en Haïti, auprès de notre partenaire le Mouvement Paysan Papaye (MPP). Thomas Brigatti lui a choisi de s’envoler vers la République démocratique du Congo aux côtés de l’APEF. Comment vivent-ils cette expérience ? Comment participent-ils aux projets ? Ils nous en parlent.

Quelles étaient vos motivations avant de partir ?

Sarah Hopsort  : D’abord, c’est le domaine d’intervention, l’animation rurale qui m’a intéressé. En plus, il s’agissait de travailler avec un mouvement paysan, et j’avais envie de connaître un mouvement à la fois politique et paysan. Après, concernant Haïti, c’est un pays que j’ai connu d’abord par la littérature et que j’ai découvert sur place. C’est un pays riche par son histoire, avec une société complexe et fragile à la fois.
Thomas Brigatti  : J’étais arrivé à un carrefour de ma vie et j’avais envie de m’engager dans la solidarité. C’était une mission qui correspondait à mon domaine de compétence et je sentais que je pouvais apporter quelque chose. Ce que j’ai aimé particulièrement dans cette mission c’est l’engagement envers les femmes, parce que pour moi, la première des inégalités est celle de genre.

Quelles sont vos impressions de vos premiers mois passés sur place, comment a été votre adaptation au contexte et vos premiers contacts avec l’équipe ?

Thomas B : Je suis arrivé avec Estelle et Chloé de Frères des Hommes. Ça a beaucoup aidé mon intégration, car je suis arrivé avec des gens déjà connus. J’ai aussi la chance d’être dans une équipe qui m’a intégré très vite.
Sarah H : Quand je suis arrivée, le projet avait déjà démarré. Cela faisait quelques mois que le MPP attendait quelqu’un pour lancer des activités. C’était un contexte plutôt positif et chaleureux. Il y a eu aussi pour moi très rapidement la découverte d’une autre langue. Ça m’a pris quelques mois pour parler mais du moment où j’ai été capable de m’exprimer en créole, ça a changé la nature de mes relations avec les gens. Sinon l’équipe a été tout de suite bienveillante, mais un peu réservée. Petit à petit, cette relation se transforme en amitié avec certains.

Quel a été le moment clé qui vous a fait passer de volontaires français à faire partie quasi intégrante de l’équipe ?

Thomas B : Je pense que c’était vraiment dans le processus de sélection des apprenantes . Ce sont les premières choses concrètes que j’ai faites, et ça a légitimé ma mission et ma place. Au fur et à mesure il y a un vrai respect mutuel qui s’installe.
Sarah H : Durant les premiers mois, je devais me contenter d’observer pour capitaliser. Cela m’allait bien mais il n’y avait pas d’utilité évidente à ce que je faisais et j’attendais avec impatience ce moment où je pourrais partager, restituer. Quand ce moment-là est arrivé, ça a été un peu le point de basculement. J’ai pu présenter certains éléments en créole, et ils ont vu que mon militantisme s’est traduit par ma compréhension de leur mouvement.

En quoi est-ce que vous vous sentez utiles ?

Sarah H : Mon domaine de compétence c’est ma capacité à observer, à comprendre, et à analyser. Ce qui est très utile pour le MPP c’est que je suis capable de suivre leurs activités, de les questionner et de faire des retours. Je travaille aussi sur le lien social entre les membres de l’équipe et les paysans. J’ai de très bonnes relations avec tout le monde et cela aide le MPP. Je peux solliciter l’implication d’une personne dans nos activités car je sais ce qu’elle sait faire.
Thomas B : J’ai la chance d’être dans un domaine, l’ingénierie de formation pédagogique, qui m’est familier. C’est une bonne chose car j’accompagne le responsable pédagogique. Je suis aussi utile par les compétences qui me sont transmises par le pôle formation de Frères des Hommes. Une de mes autres forces est de dynamiser, donner du sens à ce que fait l’APEF.

Comment vous percevez le volontariat Frères des Hommes par rapport au rôle de transformation sociale ?

Sarah H : Tout d’abord, le volontariat dans le cadre de ce projet est très apprécié par le partenaire. De mon côté, j’ai l’impression que je suis guidée depuis la fin de mes études par une volonté de changer le monde. Quand j’ai découvert le poste proposé par Frères des Hommes, je me suis vraiment dit qu’ici on croit vraiment au changement social. Je dirais aussi que mon renforcement de compétence en formation me permet de voir encore mieux comme la formation est un outil de transformation sociale. Mon volontariat me nourrit par rapport à ça mais aussi dans ma vision idéologique du monde.
Thomas B : Sur le côté spécifique de Frères des Hommes, je crois que la relation partenariale est une vraie particularité. On n’arrive pas avec des modèles préconçus et pour moi c’est la vraie plus-value, et cette dimension d’accompagnement permet de se sentir légitime.