Au Rwanda, « chacun s’approprie son collectif »

L’organisation en collectif est présente à tous les niveaux de la société rwandaise, qui cherche à reconstruire et maintenir sa cohésion. C’est aussi le but de notre projet qui met la solidarité paysanne au centre du développement de la région de Huyé, dans le sud. 4 paysans rwandais témoignent de leur mobilisation.

Comment avez-vous monté votre collectif ?

EMMANUEL MINANI : au niveau du village nous nous sommes d’abord organisés nous-mêmes, en choisissant notamment notre représentant. Une fois notre collectif sur pied, nous avons recherché des partenaires pour nous accompagner. Nous avions entendu parler de Duhamic-Adri. Ils sont venus une fois dans note zone, c’est comme cela que nous sommes rentrés en relation. Nous sommes maintenant 56 dans notre collectif. On aussi monté un petit système de crédit et nous avons nos propres statuts juridiques.

FIDELE MUHAWINIMANA : ce collectif nous permet d’être ensemble, de rassembler les informations et partager nos vrais problèmes.

CYRDION NZABAMWITA : la première raison était aussi de pouvoir partager les techniques d’agriculture auxquelles nous nous formons avec les autres paysans du village.

Comment transmettez-vous ces techniques ?

FIDELE MUHAWINIMANA : par exemple, quand il y a un rassemblement que les autorités locales organisent au niveau du canton, nous intervenons et nous montrons aux paysans différentes manières pour mieux s’occuper de leur élevage. Ils peuvent après nous nous rendre visite et voir comment nous nous faisons.

Quel est votre avis sur les formations à la « bonne gouvernance » que vous avez suivies ?

FIDELE MUHAWINIMANA : ces formations nous ont permis de comprendre l’intérêt que les paysans ont à s’organiser démocratiquement et qu’au niveau de nos organisations il faut une égale participation des femmes et des hommes. S’organiser démocratiquement veut dire organiser des élections et le respect de leur mandat par les personnes élues. Cela veut aussi dire que chaque membre respecte les opinions de son collègue. C’est important que nous fassions cela car nous avons monté notre organisation pour qu’elle puisse régler nos problèmes. Si un problème est soulevé par un de nos membres, nous devons en prendre compte et voir comment le résoudre. Il faut que ce soit examiné par tous et que la personne concernée voit sa situation débloquée.

Ça a changé quoi dans le groupe ?

NZABAMWITA CYRDION : nous avons su élaborer des règles adaptées à nos besoins, ça se voit par exemple dans le règlement que nous avons élaboré. Nous nous sommes assis ensemble et de cette réunion est sorti ce règlement. Avant les réunions n’étaient pas bien dirigées, il n’y avait pas de compte-rendu et les décisions prises ne correspondaient pas à ce dont nous avions parlé.

DOROTHEE MURORUNKWERE : on s’est assis ensemble et on l’a écrit nous-mêmes. Duhamic-Adri nous a accompagnés dans la démarche.

CYRDION NZABAMWITA : ça a remis en question notre façon de fonctionner. Nous avons vu que chaque membre s’appropriait son collectif, qu’il s’y retrouvait, qu’il était considéré, que c’était SON organisation. Avant il y avait des mésententes, on ne travaillait pas en équipe. Après avoir été formés, on a formé à notre tour les autres membres de notre organisation. Ça s’est fait dans le consentement, sans avoir été imposé.