[Portrait du mois] Clémence, bénévole lilloise, témoigne des actions en France

Depuis 2022, Frères des Hommes réalise des actions collectives solidaires en France à Paris, Lille et Saint-Etienne. L’objectif est de s’ancrer dans son territoire, identifier des partenaires locaux et co-construire des actions avec des personnes en situations de vulnérabilités. Clémence, qui a participé à l’organisation de ces actions à Lille, témoigne de son expérience bénévole avec Frères des Hommes.

L’action France à Lille menée avec des MNA (mineurs non-accompagnés) soutenus par notre partenaire Utopia 56, prend la forme d’ateliers hebdomadaires. C’est notamment au sein de la ludothèque de l’association Chez Audulle qu’ils se déroulent. L’objectif est d’organiser des rencontres intergénérationnelles autour d’ateliers jeux.

Comment est-ce que tu as connu Frères des Hommes ?

Je pense qu’on avait la crainte de ne pas réussir à mobiliser un groupe. Sinon je prenais les choses telles qu’elles venaient. J’étais animée car l’action me plaisait bien. C’était clair dans ma tête en termes de mobilisation, de motivation, donc après le reste c’était entre les mains des jeunes. On préparait nos ateliers en visio. Et malgré le fait qu’on ne se connaissait pas de base avec les autres bénévoles, on avait un cadre, mais qui restait ouvert bien évidemment aux envies et propositions des jeunes. J’ai donc d’abord vécu l’alliance en interne avec les autres personnes de l’équipe bénévole, puis avec les jeunes.

Est-ce que tu peux me raconter comment se sont passés les premières journées d’ateliers avec les jeunes accompagnés par Utopia 56 ?

On a d’abord fait deux temps informels les samedis, à leur temps de permanence sur leur lieu d’accueil géré par Utopia 56. L’association nous a aussi expliqué la problématique des jeunes et les activités qu’ils faisaient lors de ces permanences. Puis on a rencontré les jeunes, on leur a présenté Frères des Hommes et notre souhait de faire avec eux un projet autour d’une action collective solidaire tous ensemble, en nous appuyant sur des exemples concrets. Pour ça, je me suis donc inspirée de ce qui avait été fait par l’équipe de Paris. Ça m’a permis d’illustrer nos propos. On souhaitait réussir à constituer un petit groupe et que les jeunes prennent plaisir à venir et à s’engager. Puis, on a échangé avec Utopia 56 pour leur transmettre des pitch d’approches à transférer aux jeunes par WhatsApp pour les aiguiller. On a voulu voir comment les jeunes réagissaient et prendre la température. Certains se sont directement projetés et engagés de façon proactive.
L’action en elle-même, a duré environ deux mois et demi : les 5 ateliers les samedis matin, puis les 3 actions mises en place, et enfin, le pot de clôture. Les actions mises en place sont nées grâce aux ateliers de photolangage qui ont fait émerger chez les jeunes, plusieurs idées. Parmi celles-ci, ils ont fini par voter pour une action de rencontre intergénérationnelle. Les jeunes étaient très curieux de connaître les parcours de vie des personnes âgées, et de leur raconter les leurs en retour. Il y avait toujours cette notion de créer du lien.

Comment s’est passée la relation avec les jeunes pour toi ? Est-ce qu’il y a des choses qui t’ont surprises ?

Ça s’est construit avec le temps. Il a fallu plusieurs ateliers pour retenir les visages, les prénoms, et briser la glace. C’est plus au bout du 3ème atelier et de la création du groupe WhatsApp que ça s’est concrétisé dans les actions. Puis ensuite, les rencontres se sont approfondies. Ce sont des jeunes qui sont hyper attachants, ils sont vraiment dans l’action, ils nous ont beaucoup facilité la tâche, ça fusait entre eux. Ils avaient pleins d’idées, ils étaient hyper dynamiques. C’était presque un challenge des fois, car ça reste des adolescents. Donc je retiens surtout leur envie de faire les choses, ils ont un potentiel de folie, ils ont un savoir-être naturel et savent se positionner en groupe. On prend une claque, car malgré leur parcours, ils arrivent très naturellement à être proactifs, respectueux et spontanés. La plupart du temps, on n’avait même pas besoin de leur donner de consignes, on n’a jamais rien eu à leur dire (hormis de laisser leur téléphone de côté lors des ateliers). Tout était fluide et on a eu d’excellents retours des groupes. Leur présence était plus qu’appréciée, même réclamée par les personnes âgées. L’association avec laquelle on réalisait les ateliers nous a même dit « c’est magique cette symbiose autour des jeux qui resserrent les liens ». On a coché toutes les attentes que ce soit du côté des jeunes, du partenaire ou de nous.

À ton avis, qu’est-ce que ces ateliers ont apporté aux jeunes MNA ?

Au vu de comment ça s’était passé, ça nous confirmait qu’on faisait bien, dès les premiers ateliers, d’aborder les questions de racisme. Car malgré leur dynamisme et le fait qu’ils soient sûrement malheureusement habitués à ça, c’était important selon nous, de discuter des préjugés face auxquels ils pouvaient faire face. Dès qu’on le pouvait, on partait de leurs expériences et de leurs vécus. On a souvent échangé sur cette thématique du racisme, que ce soit lors des ateliers ou lors de temps off. Certains se livraient beaucoup, dont un qui m’avait confié être parti de Strasbourg à cause de ça et qu’à Lille, il vivait beaucoup mieux sa situation. Ils discutaient souvent de comment ils réagiraient s’ils étaient confrontés à des situations racistes. On a également parlé de Solidarité lors de cet atelier. Beaucoup nous ont parlé de gestes solidaires qu’ils font dans l’espace public. On a eu énormément de retours d’expériences : lors du pot de départ, l’un des jeunes qui avait participé à l’atelier et qui avait bien accroché avec une petite fille et sa mère, nous a confié que cette dernière l’avait reconnu un jour dans le métro et que ça l’avait touché. C’est ça aussi la force de ces actions, ce sont les liens qui se créent. Aude, la bibliothécaire de Chez Audulle, s’est énormément investie. Elle avait ramené un cadeau pour nous tous lors du pot de départ et a témoigné aux jeunes à quel point elle avait été touchée par eux. Chacun à fait un petit mot pour la remercier. Ils ont été tellement reconnaissants tout du long. Ils ont vraiment aimé qu’on s’intéresse à eux, qu’on les prenne en considération, qu’on leur accorde du temps et ça c’était fort. On les a évidemment remerciés aussi en retour, de ce qu’ils nous apportaient.

Qu’est-ce que ce type de bénévolat t’a apporté ?

Pour moi ce fut une expérience collective, comme je le voulais. Cette expérience fut riche et n’a fait que renforcer ma croyance en la force du collectif. Cette notion de faire alliance, je ne l’utilisais pas trop avant. On se base sur l’éducation populaire et ça m’a donné envie d’approfondir ces sujets. J’aimais également beaucoup l’horizontalité du projet, même si ça demande de la pratique en soit. Ma mère faisait justement de l’éducation populaire, et pour moi c’était très abstrait. Et finalement, aujourd’hui je comprends mieux et je prends le relais. Je pense que le bénévolat ouvre des portes et je suis contente de cette expérience car ça m’apporte un renouveau pour mes projets d’avenir. Je n’avais jamais monté de projets comme ça avec un groupe de personnes en situations de vulnérabilités, de A à Z et ça m’a beaucoup plu. Je resterai dans la fibre sociale ça c’est sûr !


Un immense merci aux bénévoles de l’association qui font vivre Frères des Hommes depuis de nombreuses années. Ce récit t’inspire et tu souhaites nous rejoindre ? Inscris-toi à un temps d’information en ligne ici.